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Interview avec Sandy Chauvet, auteure : Se libérer des non-dits et prendre la parole

Propos recueillis par Anusha Rung


La naissance d'un premier amour virtuel à l'époque légendaire de MSN : C’est le sujet nostalgique qu’aborde l’auteure Sandy Chauvet dans sa nouvelle Serais-je heureuse ?, publiée dans le deuxième volume de la revue littéraire Soleil hirsute - numéro 2 - automne 2021 (à lire et télécharger gratuitement dans l’onglet Magazine). Dans cette interview, elle nous parle de son processus de création et de ses goûts littéraires éclectiques.


Comment vous est venue l’idée d’écrire « Serais-je heureuse » ?

Lorsque j’ai lu l’intitulé de l’appel à textes, je me suis questionnée sur mes souvenirs et leur impact, j’ai réfléchi à comment ce qu’on se rappelle peut influencer notre présent. Et puis, je me suis perdue dans mes souvenirs. Ma nouvelle est inspirée d’un pan de ma vie passée.


Extrait de la nouvelle « Serais-je heureuse ? »

Votre récit se déroule à une époque précise, celle de l’apogée de MSN. Pourquoi avoir choisi cette période ?

J’ai choisi cette époque, car c’est celle de mon adolescence. Ce fut une période assez perturbée et difficile pour moi, mais c’est aussi une grande source d’inspiration. Je suis convaincue que la souffrance est un moteur puissant et finit par nous aider à créer de belles choses, souvent positives.



Étudiante dans le domaine de la communication numérique, je me rends compte que l’apogée de MSN a été un moment clef dans ce domaine pour ma génération. Surtout à présent avec des plateformes telles qu’Instagram et TikTok qui ont pris la relève depuis longtemps. À mon époque, c’était assez nouveau. Nous pouvions communiquer facilement avec des amis ou des étrangers qu’ils soient prêts ou loin. C’était une façon de toujours avoir un ami à porter de main et une oreille disponible à toute heure.

Pouvez-vous nous parler d’un sujet important abordé dans votre nouvelle ?

Dans ma nouvelle, il est question de non-dits, de sentiments inavoués. Je pense que c’est un thème qui touche beaucoup de gens, et ce, dans tout type de relation. Il est difficile de parler de ce que l’on ressent, de se livrer et donc de prendre le risque d’être blessé.


On dit toujours que les actes comptent plus que la parole, mais je ne suis pas d’accord. Les mots permettent de sceller les actions et leur donner une dimension plus profonde.

J’ai longtemps été renfermée sur moi-même, impossible de mettre des mots sur mes émotions. C’est un exercice difficile, mais comment peut-on demander à une personne de deviner ce que l’on peut penser et ressentir sans le lui dire ? J’espère que ma petite histoire saura donner le courage à ceux qui sont dans une situation de non-dits de s’en libérer et de prendre la parole. Parler, divulguer nos pensées et sentiments est puissant même si c’est très effrayant.

Un moment marquant dans votre parcours d’auteure ?

Photo fournie par l’auteure

En 2020, on m’a proposé d’écrire un article sur un blogue écologique. J’ai toujours aimé écrire et j’étudie le journalisme, mais cela restait encore loin dans mon esprit. Puis, je me suis dit qu’au final j’avais peut-être bien les compétences pour écrire. Cette année-là, j’ai produit de nombreuses nouvelles pour des concours et cela m’a libéré de mes appréhensions et de mes doutes concernant ma place dans l’écriture en général et ma légitimité.

Qu’est-ce qui vous pousse à écrire et à partager vos œuvres ?

J’ai toujours aimé écrire. À 17 ans, j’écrivais des « poèmes », puis de nombreux textes, surtout sur ce que je ressentais (puisque je n’arrivais pas à en parler à voix haute). J’aimais jouer avec les mots, leur double sens, les figures de style, les rimes.


L’écriture a toujours été autant une échappatoire qu’un simple jeu.

J’ai écrit de nombreuses lettres à mes proches, j’en écris encore souvent. Ma grand-mère m’a toujours dit que lorsqu’on n’arrive pas à parler à quelqu’un, on peut lui écrire une lettre. En général la personne va la lire en entier et ne pourra pas nous couper la parole. C’est une façon de se faire entendre.


Je pense aussi que j’ai été inspirée par les auteurs marquants de l’histoire tout comme d’autres, moins connus, qui ont su manier les mots et faire vivre des émotions au travers de leurs écrits. J’espère pouvoir avoir un impact sur quelques lecteurs et leur faire ressentir quelque chose au travers de mes mots. Leur faire découvrir des histoires qu’ils n’ont jamais vécues et soulever de nouvelles questions.

La nouvelle semble être votre genre de prédilection. Pourquoi ?

C’est marrant parce que jamais je n’aurai pensé en être capable. Avant 2020, je n’avais jamais écrit une seule nouvelle, je n’en connaissais pas les règles. Puis, au fur et à mesure que j’en écrivais pour des appels à textes, j’ai commencé à apprécier ce genre et à aimer relever ce défi d’écrire peu. Moi qui ai toujours de la peine à ne pas en faire trop, c’est un excellent exercice qui me met sans cesse face à moi-même. J’apprécie surtout écrire des nouvelles avec des fins surprenantes, qui laissent avec un doute ou qui sont tristes. Finalement, je pense que c’est effectivement bien mon genre, la nouvelle.

Quels auteurs ou auteures vous inspirent particulièrement et pourquoi ?

Difficile de donner des noms, car je trouve que de nombreux auteurs ont, au moins une fois, écrit quelque chose de particulièrement touchant ou inspirant. Par exemple, récemment, j’ai lu Le parfum de Süskind. Ce fut une lecture des plus surprenantes qui m’a vraiment attirée par la fascination que l’on développe pour son personnage peu séduisant, voire répugnant.


Je suis, en général, plus attirée par le roman que par son auteur. J’ai été particulièrement touchée par les lectures que j’ai faites lorsque j’ai repris mes études une fois adulte. J’ai aimé F.R. de Chateaubriand avec René, A. Breton, M. Duras avec Moderato cantabile, puis A. Rimbaud. Mais je suis tout autant transportée par des écrivains plus accessibles qui ne font pas de la « littérature » comme le dirait mon ancien professeur de français. Rien de tel qu’Harry Potter pour se remonter le moral et voyager dans un autre univers.

Un livre (fiction ou non-fiction) que vous nous recommandez ?

Un jour de D. Nicholls est l’un de mes livres favoris avec Gatsby le Magnifique de F.S. Fitzgerald. Des fins semblables à celles que je donne à mes nouvelles, finalement. J’ai tout autant énormément accroché avec le style de l’auteure et l’histoire de la série Insaisissable de T. Mafi. Vous l’aurez compris, difficile pour moi de n’en citer qu’un.

En tant qu’auteure, quelle est votre ambiance de travail idéale ?

Je peux écrire partout. Une fois que je me lance dans mon histoire, le reste disparaît. À choisir, l’idéal serait d’être tranquillement chez moi avec une bonne tasse de thé noir bergamote. De la musique country ou de la pop. Quelque chose avec un rythme léger et une ambiance automnale. Étrangement, je n’écris que très rarement à cet endroit et dans ces conditions. Peut-être par manque de temps.

Une citation que vous aimez ?

« S’inquiéter, c’est souffrir deux fois ». Une citation que l’on retrouve dans le film Les Animaux fantastiques.


Bio de l'auteure :

Mon caractère bien trempé et ma gentillesse sans limites ont poussé mon cœur à se cacher derrière des jeux de mots et des textes énigmatiques.

C’est au travers de mon bachelor en sociologie que j’ai étayé mon esprit critique. Le monde vaste est plein de questions auxquelles parfois quelques simples mots peuvent apporter une réponse nouvelle. À 31 ans, je ne sais pas si je suis encore jeune ou déjà plus tant que cela. J’ai parfois le sentiment d’avoir vécu mille vies, mais je sais que mon esprit est curieux de tout.


Auteure, créatrice de bijoux, directrice d’une boutique en ligne, je termine mon master en journalisme et communication digitale à Genève. Adepte des points-virgules, je ne sais parfois plus où donner de la tête. Pourtant, j’espère n’avoir jamais le temps de côtoyer l’ennui. Mon ambition secrète ? Écrire un livre... Et pourquoi pas deux ou trois, même.

Pour suivre les aventures littéraires de Sandy, rendez-vous sur son compte Instagram : https://www.instagram.com/nouvelles_sandy/

1 comentario


DJ Moose
DJ Moose
15 ago 2022

C'est si fou comme la technologie a pu modifier nos façons d'entrer en relation, comme si les civilisations s'effondraient et se reformaient au fil des plateformes et des nouveaux paradigmes à la vitesse de l'éclair.

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